Nous avons dans le précédent volet sur les "Psaumes du Désert" dejà parlé du Psaume de l'humiliation (Ps.51): "Miséricorde et Grâce!", nous parlerons encore des Psaumes de la Persécution, de l'assemblée, des Martyrs et des Batailles.
Le Psaume de la Persécution
Si nous voulons nous en tenir à Anduze et aux Cévennes, la persécution date de l'an 1557, et des lettres patentes, rédigées cette-année là, tout spécialement pour les "hérétiques des Cévennes" (dit leur titre). L'Eglise d'Anduze, comme beaucoup d'autres, était née à la lueur d'un bûcher, avait été baptisée par le sang d'un martyr. Un moine, nommé Claude Rosier, ayant osé, en plein carême, dénoncer les abus de la papauté, avait été obligé de s'enfuir; il s'était réfugié à Genève, avait écouté quelques leçons de Calvin, et était revenu, prêt au sacrifice suprême. A la date du 22 Août 1557, un registre notarié du temps, raconte:" Il fut pris et condamné à faire amende honorable, la langue coupée, et brûlé à petit feu, au devant de la fontaine, et mourut en martyr, soutenant toujours la religion".( L'eau de la fontaine coule toujours, là où elle coulait au 16ème Siècle).
Trois ans après, 20Juin 1560, L'Eglise était définitivement organisée,"à l'honneur de Dieu, augmentation de son Eglise, et utilité de nos prochains".Or cette année 1560, est la grande année pour toutes les Cévennes, comme pour Anduze. " Ce fut en ce temps, écrit *Théodore de Bèze , que ceux des montagnes des Cévennes reçurent avec une merveilleuse ardeur la Vérité de l'évangile, tellement que, quasi en un instant furent dressées plusieurs communautés".Et il cite Anduze, Mialet, Sauve, St-Jean du Gard, Aulas, St-Germain de Calberte, St-Etienne Vallée Française, Le Pont de Montvert, St-Privat, Gabriac, et autres. Et cette même année encore, 1560, au milieu des périls d'une persécution terrible, se réunit à une heure de Mialet, dans une grotte sous le hameau d'Aigladine" le premier synode (provincial) où quinze responsables organisèrent la grande mission qui allait parcourir les Cévennes, le Vivarais, le Bas-Languedoc et le Rouergue. C'est au même moment (encore) que fut promulguée la Loi, sous laquelle les vrais disciples de Christ, en France, faut-il dire : Allaient vivre? ou, allaient mourir? - Pendant deux siècles. Et cette Loi était promulguée " honneur tragique" " contre les hérétiques des Cévennes", à propos de ce qui s'était passé à Anduze, en 1557. Ayant appris qu'un prétendu religieux avait tenu des" propos erronés et scandaleux contre la religion Catholique" et que 2 à 3000 personnes avaient écouté ces propos, Le Roi **henri II se hâtait de mettre le nouveau culte hors la Loi. Il mobilisait " Le ban et l'arrière-ban de la sénéchaussée, gens de guerre tant de pied que de cheval". Il ordonnait de prendre les" rebelles vifs ou morts",et garantissait les auteurs de toutes ces barbaries contre toute réclamation, "punition ou amende", soit pour blessure, soit pour mort. Anduze fut appelée la " Genève du midi"; elle fut non seulement grande , mais "unique". Nous essayons de dire l'honneur des Cévennes, sans être infidèles, ni à la vérité de l'histoire, ni à l'esprit de l'Evangile.Les fureurs se déchaînèrent, et cela dura deux siècles, grâce aux centaines d'ordonnances qui se succédèrent, obligées à se répéter, puisque tout avait été dit le premier jour.
C'est ainsi qu'en Septembre 1703, par exemple, arrivait un ordre de détruire 440 villages et 608 hameaux et d'emporter de là, au milieu de l'hiver, plus de 20.000 paysans. Comme il était un peu long de démolir tant de maisons avec la pioche, on fit observer que cela irait plus vite avec le feu. La cour envoya l'autorisation, et ce fut " comme une tempête qui ne laisse rien à ravager, dans un champ fertile, ou dans une vigne féconde. Les maisons ramassées, les métairies écartées, les granges, les baraques, les cabanes, les chaumières, tombèrent sous l'action du feu comme les fleurs champêtres, les mauvaises herbes, et les racines sauvages tombent sous le tranchant de la charrue qui les coupe. Il faut renoncer à se faire une idée de la vie et de la mort affreuses des huguenots pendant des siècles. Dans les bois, dans les grottes, c'est maintenant une pauvre troupe qui erre, se cache, paysans, laboureurs, bergers, vieillards, femmes.... Les persécuteurs ne parlent que de vile populace, de canailles, et, de leur chef, ils disent: "C'est un paysan du plus bas étage".
Bâville, son clergé, son roi, ne comprennent pas. La religion chrétienne revenait à ses origines du 16ème siècle, à ses cardeurs et fouleurs de laine de Meaux; elle revenait à ses origines du 1er siècle et, avec Saint-Paul, elle pouvait dire:" il n'y a pas beaucoup de puissants, ni de nobles parmi vous";mais elle pouvait aussi ajouter:" Dieu a choisi les choses méprisées et celles qui ne sont point, pour confondre celles qui sont".
Le doux Brousson faisant monter à Dieu la prière générale des fidèles persécutés et massacrés pour le service de Dieu, disait: " Que pouvons-nous donc devenir, Seigneur, si tu n'as pitié de nous? Nous avons cherché les lieux les plus éloignés du commerce des hommes.... durant les ténèbres de la nuit, pour invoquer ton Saint nom. Mais nos ennemis nous y sont venus chercher pour nous massacrer. Ils ont répandu le sang innocent, ils ont dévoré les pauvres brebis..."
Il est un Psaume que l'on peut désigner comme le Psaume de la persécution. C'est le Psaume 79: " Les gens entrés sont dans ton héritage".
C'est le premier, qui retentit dans la première église où la persécution éclata, à Meaux, en 1546. Quatorze fidèles furent arrêtés dans une réunion. En les voyant passer, le peuple se mit à chanter: "Les gens entrés sont dans ton héritage", et le lendemain en allant au supplice, les 14 chantèrent le même Psaume.
En 1556, à Angers, Jean Rabec, auquel on venait de couper la langue, tout en crachant son sang, trouvait encore le moyen de balbbutier:" Les gens entrés sont dans ton hérirage".Ainsi des plaines du Nord, et des plaines du Centre, jusqu'aux montagnes des Cévennes, le Psaume douloureux fait entendre la plainte des persécutés:
Tes ennemis sont dans ton héritage
Ton sacré temple a senti leur outrage;
Jérusalem, Ô Seigneur! est détruite,
Et par leur rage en masures réduite
Ils ont donné les corps de tes serviteurs morts
Aux oiseaux pour curée,
La chair de tes enfants
Aux animaux des champs,
Pour être dévorée.
Ne nous rends pas confus Et ne te souviens plus
De toutes nos offenses:
Dans cette extrémité,
Hâte par ta bonté
La fin de nos souffrances.
Voici quelques récits authentiques de persécutions:
Un enlèvement d'enfants (avant 1662)
Il y avait à Rouen un riche protestant nommé Louis Du Val, qui résolut de conduire ses enfants au collège (protestant) de Sedan. Il passa par Reims, et là un prêtre, ayant connu son projet,lui enleva secrètement ses deux enfants et les conduisit chez les Jésuites de Pont-à-Mousson.Le père intenta un procès à ce prêtre ravisseur et en vertu de l'article 18 de l'Edit de Nantes"défendant aux catholiques d'enlever les enfants protestants par force ou induction", le fit sévèrement condamner par le juge de Verdun. Le prêtre condamné en appela au parlement de Paris et le parlement condamna Louis Du Val aux dépens et ordonna que ses deux enfants seraient mis au Collège de Navarre (à Paris) pour y être élevés dans la religion catholique, que leur père leur fournirait pension, " et lui est interdit de les prendre ou faire reprendre, sous peine de trente mille livres d'amende".
Les déportés du Midi (1687)
Un officier français, des Cévennes, naviguant sur un vaisseau hollandais, raconte, le 17 Avril 1687, comment il a rencontré dans la Méditerranée un vaisseau de Marseille chargé de protestants qu'on déportait aux Antilles.
" Dès que nous avons été à bord du vaisseau français, le capitaine nous a fait apporter la collation, et un moment après nous avons vu paraître quelques Demoiselles à qui la mort était peinte sur le visage, lesquelles venaient en haut prendre l'air. Nous leur avons demandé par quelle aventure elles s'en allaient en Amérique. Elles ont répondu avec une contenance héroïque:" Parce que nous ne voulons pas adorer la Bête, ni nous prosterner devant des images.Voilà notre crime". (L'Officier reconnaît une de ses cousines, et demande au capitaine la permission de descendre l'échelle).
"Je ne fus pas plus tôt au bas que je vis 80 jeunes filles ou femmes couchées sur des matelas, accablées de maux. Ma bouche fut fermée et je n'eus pas le mot à dire.Elles me dirent les choses du monde les plus touchantes, et au lieu de les consoler elles me consolèrent, et (moi)ne pouvant parler, elles me dirent d'une commune voix:"Nous mettons le doigt sur nos lèvres et nous disons que toutes choses viennent de celui qui est le Roi des rois. C'est en celui-là que nous mettons notre espérance".
"D'un autre côté, on voyait cent pauvres malheureuses accablées de vieillesse et que les tourments des tyrans ont réduites aux abois. Nous en avons vu de toutes sortes, de tous
âges et de toutes qualités. Elles m'ont dit que lorsqu'elles partirent de Marseille elles étaient 250 personnes , hommes, femmes , filles et garçons, et qu'en quinze jours il en est mort dix-huit. Il n'y a qu'une demoiselle qui est du Poitou, toutes les autres sont de Nimes ou de Montpellier ou aux environs...."
Blanche Gamond à l'hopital de Valence(1687)
Blanche Gamond, de St-Paul-trois-châteaux (Drôme) arrêtée en Dauphiné comme elle essayait de fuir du royaume, a été condamnée à être rasée et recluse à perpétuité. Elle raconte elle-même ses souffrances. Elle avait alors 21 ans. "La rapine (c'était d'Herapine dirigeant l'hôpital) vint transporté de furie et de rage, qui avait un doigt d'écume à la bouche. Il me dit: " Tu es encore là, gueuse ! Personne ne peut obtenir sur toi de quitter cette mauvaise religion!...Tu recevras les étrivières présentement, ensuite on te mettra dans un cachot où tu crèveras...". Il s'en alla à la cuisine et dit aux cuisinères: " Donnez les étrivières à cette huguenote, mais ne l'épargnez pas; et si vous l'épargnez vous serez mises à sa place".
" A l'instant on me fit lever et on me fit entrer à la cuisine. Et je vis six filles, qui chacune d'elles liait un paquet de verges d'osier de la grosseur qu'une main pouvait empoigner et de la longueur d'un aune. on me dit: " Déshabillez-vous"... J'étais nue depuis la ceinture en haut.On apporta une corde, de laquelle on m'attacha à une poutre. Et alors elles déchargèrent leur furie dessus moi et en me frappant l'on me disait: " Prie ton Dieu!" Ce fut à ce moment que je reçus la plus grande consolation que je puisse recevoir de ma vie, puisque j'eus l'honneur d'être fouettée pour le nom de Christ et de plus d'être comblée de ses grâces et de ses consolations..
On avait beau s'écrier:" Redoublons nos coups, elle ne les sent pas!" Et comment aurais-je pleuré puisque j'étais pamée au dedans de moi? Mais sur la fin, mes pieds ne purent plus me soutenir.... aussi j'étais pendue par mes bras. Alors on me détacha, pour me frapper mieux à leur aise. Elles achevèrent de me gâter les verges sur mon dos, tant que le sang me coulait des épaules.... En me vêtissant ma chemise elles me disaient: " Demain vous en aurez autant si vous ne changez pas". Je leur répondis: " Je sais que je changerai de la terre au ciel, mais pour de religion, jamais de la vie!"
Trois courageuses filles(1686)
Suzanne Coulès, de Metz, à la fin de 1685, fuyant en Allemagne, fut arrêtée à Hombourg, à l'entrée des forêts de Kaiserslautern, hors du royaume, par un officier d'une garnison française.
Elle fut ramenée à Metz et emprisonnée. Peu de mois après, avec une autre jeune fille de Metz, Marie Dubois (dont le père avait déjà pu fuir) et une autre jeune bourgeoise de Vitry-Le-François, Marie Jacobée, elles promirent de grandes récompenses à un roulier, qui voulut bien les mettre dans un tonneau emballé de toile, les trois ensemble." Il n'y avait, raconte Marie Dubois, qu'une petite ouverture par où nous pouvions respirer. Malgré l'incommodité d'une telle voiture, Dieu nous donna des forces pour rester trois jours et trois nuits dans ce pitoyable état. Il n' y avait plus que quelques lieues de chemin à faire pour être sauvées, quand le charretier entendant battre la générale par la garnison de Hombourg s'effraya mal à propos. Il s'enfuit. Nous sortimes de ce misérable tonneau et nous allâmes nous jeter dans un bois".
Arrêtées par des paysans (à qui on promettait le butin qu'ils feraient sur les fugitifs) les trois filles furenr ramenées encore à Metz et condamnées à entrer dans une maison religieuse. Le roulier alla aux galères.
Marie Dubois, en Août 1687, réussit à s'évader du couvent, et déguisée tantôt en paysan, tantôt en valet, elle suivit un guide qui, par Charleville, la mena jusqu'à Liège.
*Ecrivain et réformateur. Après avoir abjuré le catholicisme en 1548, il embrassa le calvinisme et s'établit à Lausanne, où il fut professeur de grec à l'Académie. En 1558, il quitta Lausanne et s'installa à Genève où il retrouva un poste à l'Académie ; il devint alors le principal collaborateur de Calvin. En août 1561, il représenta les calvinistes lors du colloque œcuménique réuni à Poissy, sur les instances du chancelier Michel de L'Hospital, qui espérait parvenir à une entente entre catholiques romains et réformés ; de Bèze, en affirmant son refus tant de la Transsubstantiation (catholique) que de la consubstantiation (luthérienne), ruina les espérances du chancelier. Il ne rentra cependant pas immédiatement à Genève, et Catherine de Médicis, qui voulait encore croire à une entente possible, le retint quelque temps auprès d'elle, le consultant sur ses décisions de politique religieuse. En 1564, à la mort de Calvin, de Bèze lui succéda dans les charges qu'il occupait à Genève. En 1574, il publia Du droit des magistrats sur leurs sujets ; il y développe l'idée que le but de l'Etat est d'œuvrer au bonheur des sujets, et que, en matière religieuse, le pouvoir civil doit se mettre au service de l'Eglise et réprimer les hérésies.
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**Deuxième fils de François 1er et de Claude de France il est prisonnier en Espagne à l'age de 7ans pendant 3ans gage pour la libération de son père. En 1536 son frère aîné meurt il devient le Dauphin. En 1536 , il a 17ans , il doit épouser Catherine de Médicis alors qu'il aime une jeune veuve ( de 19 ans son aînée quand même) .En 1547 il succède à son père et poursuit sa politique contre Charles Quint et l'Angleterre.En septembre 1558 Henri 2 pressé d'en finir avec cette guerre, poussé par les problèmes intérieurs causés par les protestants, accepte l'ouverture de négociations avec l'Espagne. Les négociations traînent en longueur mais à la cour de France le clan de la paix (Montmorency, Diane de Poitiers) l'emporte sur celui de la guerre ( les Guises et la reine Catherine de Médicis). Les négociations finalement aboutissent auen 1559 dans lequel la France conserve les trois évêchés ( Metz, Toul et Verdun ) et Calais et renonce au Milanais. Ceci mettra fin définitivement aux guerres d'Italie. Le roi peut alors se consacrer à la lutte contre les protestants, il avait déjà promulgué l'édit de Chateaubriant en 1551, il promulgue l'édit d'Ecouen en 1559 qui est plus répressif, il condamne de mort l'exercice du culte protestant. Il y aura 88 exécutions de protestant sous le règne d'Henri 2. Mais la réforme continue à s'étendre et pas seulement dans le petit peuple.