Le Psaume des batailles
( Psaume 68 )
Il y aurait bien d'autres Psaumes à citer, car nos pères les ont tous chantés, et il s'est toujours trouvé une circonstance pour laquelle le Psaume semblait être fait.
Mais nous ne voulons plus parler que du Psaume des batailles, le 68ème.
Le reproche que certains font aux camisards, c'est d'avoir pris les armes. Mais écoutons l'un de leur chefs Jean Cavalier : " Nous n'avions pas pris les armes pour attaquer, mais pour nous défendre!..... La cruelle persécution nous y avait forcés..."
L'intendant du Languedoc reconnaîtra lui-même qu'ils n'avaient pas tirés les premiers. Ils voulaient libérer leurs prisonniers, défendre leurs femmes et leurs enfants, survivre à l'extermination, adorer Dieu librement- ce qui était leur crime.
N'oublions pas que leur résistance au despotisme, en faisant face aux assauts de tous genres qu'on leur livrait tous les jours, permit au feu sacré de la VERITE de ne pas s'éteindre. Cette période servit de transition et permis la survie du christianisme authentique. Pour mémoire, nous rappellerons qu'avant cette époque de résistance, ils avaient supporté, au 16ème siècle, quarante année d'une persécution abominable, et au 18ème siècle, vingt années d'une persécution non moins abominable, plus abominable encore.
Nous ne pouvons pas, du reste, nous permettre de juger ces pauvres infortunés qui essayèrent de parer les coups des bourreaux qui torturaient ou massacraient leur vieux pères , et leurs mères, et leurs femmes , et leurs chers enfants sous leurs yeux...... Epoque sans entrailles dont l'horreur trop souvent nous échappe.
Ces soldats avaient une étrange façon de combattre, au moins d'après les habitudes modernes. Quand l'ennemi s'approchait, ils mettaient genoux en terre, essuyaient immobiles le premier feu; puis, ils se levaient, entonnant le Psaume des batailles et s'élançaient à l'ennemi.
C'est en chantant leurs Psaumes que les camisards, conduit par Abraham Mazel, entrèrent, le 22 juillet 1702 à 10h. du soir, dans le Pont- de- Montvert, pour aller délivrer quelques frères et quelques soeurs torturés dans les caves du hideux Abbé du Chayla. La résistance armée de l'abbé provoqua le premier combat, qui inaugura toute la guerre. Le chant des Psaumes avait tout précédé.
Ainsi, les insurgés, dont la petite troupe avait grossi, et qui ne pouvaient plus rentrer chez eux, s'organisèrent en groupes et vécurent désormais dans les bois, inaugurant de la sorte la vie de "maquis".
Voici le témoignage d'un officier de l'armée royale, sur la terreur que suscitait le chant du Psaume des batailles : " Quand ces diables-là se mettaient à chanter leur.... (ici un juron) de chanson : " Que Dieu se montre seulement", nous ne pouvions plus être maîtres de nos gens; ils fuyaient comme si tous les diables avaient été à leurs trousses.
Une pensée solennelle qui me servira de conclusion, s'impose, en ce moment, à mon esprit.
Grâce à Dieu ; ce n'est plus sur des champs de bataille que les chrétiens sont aujourd'hui appelés à chanter ce grand Psaume. Du reste, les batailles par les armes ne sont pas les seules, ni même les plus dangereuses, pour l'Eglise de Dieu. Que d'ennemis divers, et puissants, et terribles, menacent les chrétiens d'aujourd'hui, et tout spécialement ici dans les cévennes !
Or, à quoi servirait-il que les pères aient repoussé les dragons du grand roi, si les fils se laissaient vaincre par la tiédeur, ou les tentations du siècle.
A quoi servirait-il que les pères aient eu, héroïquement, horreur des superstitions, si les fils se plaisent lâchement à l'incrédulité ? A quoi servirait-il que les pères aient voulu mourir en martyrs, si les fils ne veulent pas vivre en chrétiens ?
Ce que la violence n'a pu faire, la liberté le fera-t-elle ?
Ah ! mes frères, l'heure est venue ou jamais, l'heure providentielle, pour faire notre examen de conscience ; c'est l'heure favorable pour que tous ces chants résonnent non seulement à nos oreilles mais au plus profond de nos coeurs ; c'est l'heure de nous humilier, et de reconnaître nos reniements et nos apostasies ; c'est l'heure de nous rendre en foule à nos saintes Assemblées, devenues désertes ; c'est l'heure d'entendre ces appels que nos Psaumes nous font entendre, que notre sainte héroïne de la tour de Constance a gravé pour l'éternelle instruction de ses enfants : Résistez ! Résistez !
Fléchissons les genoux. Prions, et comme nos pères, nous relevant- La foi ne dit pas : pour vaincre ou pour mourir, la foi dit : Pour vaincre - poussons le vieux cri de victoire, ( dont voici les termes exacts ) :
Que Dieu se montre seulement !
Et l'on verra soudainement
Abandonner la place
Le camps des ennemis épars,
Et ses haineux de toutes parts
Fuir devant sa face.
Dieu les fera tous s'enfuir
Ainsi qu'ont voit s'évanouir
Un amas de fumée.
Comme la cire auprès du feu,
Ainsi des méchants devant Dieu,
La force est consumée.
Source : Doyen E. Doumergue